Ma visite en enfer

30 ares de terrain au bout du monde. Pas de panneaux qui te dirigent. Si tu ne sais pas où chercher, tu ne trouves pas. Pourtant nous ne sommes pas en Afrique, ni dans un pays en voie de développement. Nous sommes bien dans l’Union Européenne, à 10 km de la capitale. Un refuge/fourrière financé par plusieurs municipalités, en Hongrie.

Presque 1000 animaux, dont 650 chiens. Oui, six cent cinquante. Sur 30 ares… c’est plus petit que chez moi, mais je sais, de ce point de vue je suis chanceuse. Comme le sont mes chiens. Même Zokni, qui était trouvé à l’âge de 5 mois sur les rues, avec de l’eczéma, des puces et plaies et qui est passé par un refuge. Mais pas comme celui dont je parle aujourd’hui.

L’image est affreuse. A mon arrivée le premier animal que j’aperçois est une petite chienne type staff en chaine, amaigrie, qui tremble de froid. Sa niche est loin d’être confortable ou isolée… C’est un tonneau métallique. Elle est censée garder l’entrée. Je sais déjà que ça va être dur, pourtant je n’ai pas encore passé l’entrée.

J’entre. De la boue partout, et des cages. Des cochons, des chevaux, des chèvres, un chevreuil, des chats, des émeus, des moutons…et des chiens. Au milieu de cette scène un monticule de déchets, mais j’apprends que c’est de la nourriture… « Nous avons un contrat avec une chaine de supermarchés, ils nous donnent leurs déchets pour nourrir les animaux».

Pour les chiens, nous trouvons à peu près deux types de cages : des individuels pour ceux qui « ne tolèrent pas » des congénères : 4m2 pour passer une vie. Et les box pour des dizaines de chiens : une trentaine de mètres carrés. Mais la surpopulation l’exigeant : 4-5 petits chiens passent « facilement » dans les petites cages…

Pas de chauffage, ni d’abri. 3 niches pour 10 chiens suffisent. Pas d’eau. La « gamelle » est un énorme bac en plastique : « ils mangent tous là, et quand c’est vide, nous leurs donnons de l’eau ».

Pas de balade. Pas de toilettage. « Nous avons un accord avec une toiletteuse, elle lave les chiens qui sont adoptés, pour qu’ils puissent rejoindre leur famille étant propre. Mais pendant qu’ils sont ici, ce n’est pas nécessaire ».

Au milieu de la rangée des chenils, un box est consacré aux chiots. Les mêmes conditions. J’y vois 2 portées de chiots de petit taille et 3-4 autres, tous ayant moins de 3-4 mois. Ils sont en tout 12-15 peut-être. Je n’ai pas le droit d’en adopter, car leur vaccination n’est pas faite encore. J’insiste. « Vous devez comprendre que nous ne pouvons pas faire ça. Si jamais le petit meurt chez vous à cause d’une parvovirose, ça ne va pas aller. Nous préférons les garder… ». Je ne comprends pas. Dans les conditions pareilles les taux de survie doivent être extrêmement bas. D’ailleurs, j’aperçois une tache de sang par terre, j’avertis la personne qui m’accompagne. « C’est rien, ne vous en faites pas ».

« Nous ne faisons pas d’euthanasie. Certains chiens vivent ici depuis 8-10 ans. Nous n’avons pas de limites pour le nombre d’animaux à accueillir. Vous pouvez adopter autant de chiens que vous voulez à part les chiots. Non, nous ne demandons aucun justificatif, vous faites une donation de 15 euros par chien et demain vous pouvez les prendre. Même pour les amener à l’étranger, ce n’est pas un souci. Ils ne sont pas stérilisés, sauf les chiens de race.»

J’ai envie de les prendre tous. J’ai envie de hurler. Je me sens impuissante. Comment aider ? « Donnez de l’argent. Ou de la nourriture, des plaids, nous sommes reconnaissants pour toute donation ». Mais où va l’argent des 52 municipalités ??? Changer la direction ? Changer la politique ? Recruter des familles d’accueil ? Faire de publicité ? Page FaceBook ? Prendre des bénévoles pour les promenades ? Faire connaitre que la structure existe ? Limiter le nombre d’animaux ? Isoler les chiots ?…Pas de réponse.

Je reprends la route le surlendemain pour rentrer chez moi, en France, avec 3 chiens chanceux dans des cages de transport dans ma voiture. Mais je reviendrai avec le coffre vide. Pour faire un petit pas. Pour sortir de l’enfer au moins une vie…

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